La vie parisienne des aviateurs

De nos jours, les aviateurs ont encore... l'enviable privilège de faire parfois la guerre en dentelles !

Vers le soir, lorsque monte l'odeur de la menthe et des roseaux, les jeunes gens s'éveillent. La soif, l'habitude de la vitesse, de l'air sifflant et giflant les a repris. Chacun s'élance - ils mênent leurs automobiles sur une nue de poussière blanche, se défient, se dépassent en virages d'oiseaux et le cri d'une des jeunes femmes, parfois, ressemble au cri de l'hirondelle qui fauche l'air. L'heure du dîner vient trop vite et celle du retour : minuit. Un minuit sans lune, - et sans phares. La quatre-vingts chevaux, aux poings de Chérubin, trépide, encore captive, et promet le bond en avant, la vitesse qui jette la nuque et les cheveux en arrière, emplit le cerveau d'un tourbillon incolore où se débat une joie vide de pensées...
__ Vous n'avez pas peur ? me dit le jeune homme.
__ Peur ? non. Vous avez de bons yeux ?
__ Oui certes et puis... Dans le regard grave de Chérubin passe un condescendant sourire. Vous n'avez rien à craindre. Sur auto ou sur avion, __ j'ai mon autre âme.
Colette (Extrait du N° 38 de La Vie parisienne)

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