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Heures exquises du soir... Le premier Nöel de Guerre

Pas de trève pour le 140ème RI

L’ennemi réussit à reprendre le 24 décembre la cote 101 qui domine Lihons mais le lendemain, une contre-attaque conduite à 6h 30 par la 3e compagnie du 140ème RI nous la rend à nouveau. Le chiffre des pertes subies par le 140e dans les combats livrés pour la cote 101 dépasse 500 dont 293 pour les journées du 24 et 25.

Fraternisation sur le reste du front
Des scènes de fraternisation, longtemps tenues censurées, se produiront - Extrait du JO du 30e RI : 27 décembre - Situation stationnaire - La trève de Noël continue et le calme est complet sur tout le front. Sur les 2 lignes opposées les hommes n'hésitent pas à sortir des tranchées, les allemands viennent à la rencontre des nôtres, il y a échange de journaux, tabac, cigarettes...
Dès les premières lueurs de l'aube, les boches sortirent de leurs tranchées Ce fut aux tranchées de la Tête-à-Vache que se déroula, devant mes yeux, la plus fantastique aventure de cette première année de campagne...Deux jours avant Noël, les Boches placés devant nos lignes nous firent savoir que "pour fêter la naissance de Jésus, ils demeureraient bien tranquilles toute la journée de Noël" Ils nous invitaient à en faire de même.
Ces propositions n'engendrèrent que la méfiance... Aussi, les gardes furent-elles doublées.
Nous avions tort. De toute la nuit de Noël, pas un coup de feu ne fut tiré par les Allemands. Par contre, ils alternèrent les cantiques et les chansons bachiques avec un rare souci de la neutralité...
Dès les premières lueurs de l'aube, les boches sortirent de leurs tranchées, sans armes, des bouteilles à la main, abominablement ivres ! Les uns nous montraient leurs bouteilles et nous invitaient à aller trinquer avec eux, d'autres se prenaient par la taille et dansaient...
D'autres encore, sans plus se soucier de nous, s'asseyaient sur les talus, sur les rochers, sur les souches déracinées et, choquant leurs bouteilles, continuaient leurs beuveries et leurs chansons... ll eût fallu profiter de l'occasion et faire un massacre de tous ces ivrognes mais allez donc persuader à des soldats français de tirer sur des ennemis désarmés ! Des messagers furent envoyés pour rendre compte et demander des ordres. Les ordres ne se firent pas attendre: aucune trêve légale n'existait entre les belligérants; il fallait, en conséquence, tirer immédiatement sur tout ennemi visible. Ces ordres eussent été obéis, sans aucun doute, quoiqu'à contre-coeur ! Un événement providentiel vint nous enlever nos scrupules de conscience. Cinq minutes à peine avant le retour des messagers, des officiers boches sautèrent sur les parapets et, à grands coups de poing et de pied, firent rentrer les ivrognes dans les tranchées: en quelques secondes il ne restait plus personne au dehors !
Nous eûmes, deux jours plus tard, par un déserteur, l'explication de l'événement. Les officiers allemands ignoraient l'équipée de leurs hommes. Alors, en effet que chez nous, hommes et chefs partagent les mêmes privations et les mêmes dangers, les officiers allemands demeurent en troisième ligne et laissent l'administration des tranchées aux sous-officiers. C'étaient ceux-ci qui, de leur propre initiative, avaient organisé toute l'affaire. Mis au courant, les officiers avaient aussitôt bondi en première ligne et avaient rappelé leurs hommes aux convenances !

Extrait de la revue "LES ANNALES" 12 mars 1916 (Lieutenant JACQUES P.)

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