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La Bataille d'Hébuterne - 7 au 13 juin 1915

Après les échecs des offensives de l'hiver 1914-1915 et de février 1915 en Champagne, une offensive de grand envergure eut lieu en mai 1915 en Artois et, cette fois, avec une importante préparation d'artillerie. Après quelques succès locaux, l'offensive s'enlise, les obus manquent et la résistance allemande reste opiniâtre. Le 7 juin 1915, le 140ème RI optient toutefois un dernier succès à la ferme de Toutvent près d'Hébuterne, au prix de centaines de pertes...
ferme de Toutvent Le 14 juin, le JO du 140ème RI indique une "journée relativement calme" : 9 blessés et 4 tués ! Parmi cette liste, y figure Gabrielli Joseph mais le JO ne précise pas l'origine de sa triste mort : il fut fusillé pour l'exemple !

Il faudra 18 ans pour que sa mémoire soit réhabilitée !

 
Joseph GABRIELLI, berger de son état, n'avait jamais quitté la Corse, ni même son village natal près de Corte, quand il fut mobilisé au 140e régiment d'infanterie alpine. Bien qu'il soit illettré et arriéré mental, on l'affecte à la 6e compagnie où on a plus besoin de son corps que de son esprit. Le 8 juin 1915, au cours d'une attaque, il est légèrement blessé. Son chef l'envoie se faire penser au poste de secours. En revenant, il s'égare et ne retrouve plus sa compagnie. On le retrouve cinq jours plus tard, terré au fond d'une cave à Colincamps (Pas de Calais). Malgré les témoignages des soldats et de son commandant de compagnie confirmant l'irresponsabilité de l'accusé, le conseil de guerre le reconnait coupable d'abandon de poste devant l'ennemi et le condamne à mort. La sentence est lue le 14 juin 1915 à 20 heures et GABRIELLI est fusillé une heure plus tard. Dix ans après, un témoin, M DUPOMMIER, qui avait assuré la défense de l'accusé, raconte l'exécution. " Au cours de ces quatre années de guerre, j'ai vu de terribles choses. Je ne crois pas avoir assisté à un plus triste spectacle que cette exécution. GABRIELLI, affolé, courrait devant les fusils en criant : " Maman, maman, je ne veux pas mourir… " Il se cramponnait convulsivement, tantôt à l'aumônier, tantôt à moi ; il a fallut planter un poteau sur la tranchée de deuxième ligne pour l'y ligoter. Cela a duré une demi-heure. Les hommes du peloton d'exécution étaient terriblement émus. Un seul être demeurait impassible : c'était le commandant POUSSEL.
 
Ce jourd'hui 4 novembre 1933 La cour spéciale de justice militaire, Statuant sur la requête en date du 1er juin 1933, par laquelle le sieur Gabrielli (Jules Paul), demeurant 10 rue Daviel, à Paris (13e), demande, en vertu des dispositions de la loi du 9 mars 1932, la réformation du jugement du conseil de guerre spécial du 140e rég. d'infanterie, qui a condamné, le 14 juin 1915, son fils, le soldat Gabrielli (Joseph), dudit régiment, à la peine de mort pour abandon de poste en présence de l'ennemi; Attendu que les renseignements fournis à la cour spéciale de justice militaire établissent que Gabrielli était illettré, s'exprimant mal en français, simple d'esprit, et débile intellectuel reconnu, dont la volonté était complètement annihilée par les évènements ; que jeune soldat de la classe 1914, il avait été fortement commotionné par les violents bombardements auxquels il avait assisté pour la première fois ; Que tout concourt à démontrer qu'en quittant sa compagnie dans la matinée du 8 juin vraisemblablement malade à ce moment, il n'avait pas conscience de ses actes et que débilité intellectuelle affirmée par le médecin de son village et par le capitaine de sa compagnie, était exclusive de responsabilité La cour annule le jugement du 14 juin 1915 ; Déclare Gabrielli (Joseph) acquitté de l'accusation retenue contre lui.
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