Jeudi 12 avril 1917
(une auto fantôme renverse six
agents)
Hier matin, vers une heure, à
l'intersection de la rue rue Albouy et de la
rue des Vinaigriers, les agents Testa et Leduc
virent arriver sur eux une automobile conduite
par un sous-lieutenant et montée par
deux civils et un militaire qui renversa Leduc
et serra contre une devanture l'agent Testa. Au
moment où la voiture repartait à
toute vitesse en marche arrière, ce
dernier bondit sur le marchepied et, saisissant
par les cheveux l'officier qui conduisait,
essaya de l'arrêter. Aveuglé par
le sang qui ruisselait sous les coups, le
malheureux s'affaissa avant que les agents
cyclistes qui poursuivaient les occupants de la
voiture en tirant des coups de revolver eussent
pu les rejoindre. Place de la concorde, l'auto
fantôme fut rejointe par une autre
voiture qui, vainement, tenta de la
précipiter dans les travaux. Sans
hésiter, le sous-lieutenant qui
était au volant, jeta le véhicule
à l'angle des rues Royale et de Rivoli,
démolit un bec de gaz et renversa un
agent. Rue de Liège, il renouvela les
mêmes exploits et l'auto disparut. A la
suite de l'enquête ouverte, un des civils
qui montaient la voiture, Marcel Maillet, 6 rue
Boucher, a été
arrêté à son domicile et a
fait connaître le nom de ses
compagnons.
Samedi 14 avril (l'automobiliste
écraseur, c'est l'aviateur
Navarre)
Nous avons annoncé, jeudi, la
randonnée nocturne, à travers
Paris, d'une automobile dont le conducteur "
s'amusa " à foncer sur les gardiens de
la Paix qu'il rencontra sur son chemin. Ainsi
que nous l'avons dit, un des voyageurs
arrêté a désigné le
chauffeur : c'est le sous-lieutenant
Navarre… Le sous-lieutenant Navarre,
actuellement en congé de convalescence,
avait eu déjà récemment
quelques aventures assez
désagréables à Paris. En
raison de ses prouesses militaires, on
s'était contenté de le
réprimer sévèrement, sans
donner à ses aventures les suites
qu'elles auraient pu comporter. Mais, cette
fois, la justice militaire est
saisie…
Dimanche 15 avril (le cas du
sous-lieutenant Navarre)
Un mandat d'amener pour tentative d'homicide a
été lancé par M.
Boucheron, rapporteur près le
troisième conseil de guerre, contre
Navarre. On sait maintenant que Navarre qui est
actuellement attaché à une
escadrille de chasse du front, avait
été envoyé en mission
à Paris pour y prendre un appareil
garé à Issy-les-Moulineaux et le
ramener à son escadrille. C'est pendant
ce voyage à Paris qu'eut lieu la
regrettable équipée. Enfin, avant
hier matin, au petit jour, tandis que le police
le recherchait, il se rendit à
Issy-les-Moulineaux, l'appareil qu'il avait
pour mission de ramener au front étant
prêt. Il y prit place et, par la voie des
airs, regagna son poste. Navarre étant
au front, le mandat d'amener lancé
contre lui ne pourra lui être
signifié que par ordre du grand quartier
général. L'arrestation de
l'officier aviateur semble imminente. Il sera
ramené à Paris et soumis à
l'examen des médecins
aliénistes.
|